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L’Orangerie de Montmorency

Jean-Jacques Rousseau reste certainement l’hôte le plus célèbre qu'a accueilli Montmorency. Pourtant, d’autres avant lui furent séduits par ce lieu verdoyant d’où l’on a une si belle vue.

Parmi ses plus illustres prédécesseurs, on trouve deux grands Montmorencéens dont le séjour dans notre cité est injustement moins connu que celui du grand philosophe : le peintre Charles Lebrun (1619-1690) et le financier Pierre Crozat (1661-1740), dit «le pauvre» pour le différencier de son frère ainé dont la fortune était encore plus considérable que la sienne.

Leur passage à Montmorency — au XVIIe siècle pour Charles Lebrun et au XVIIe siècle pour Pierre Crozat — fait partie des grandes heures de Montmorency, et a été le point de départ de l'édification de ce qui fut probablement, si l’on en juge d’après les documents qui nous sont parvenus, un véritable petit Versailles dont il ne reste malheureusement presque plus rien. Seule l’Orangerie du domaine a survécu ; elle est passée à la postérité mais dans quel état ! Elle fut, en effet, défigurée au XIXe siècle lors de sa transformation en logements populaires.

Position de l'orangerie;
Photo: société d'Histoire.
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Elle avait été construite sur l’ordre de Pierre Crozat au début du XVIIIe siècle dans le parc de la propriété que celui-ci avait acquise des héritiers Lebrun en 1702. Après s’être, dans un premier temps, surtout consacré à la remise en état du bâtiment, et notamment, à la rénovation du petit château qu'avait occupé le grand peintre, il décida ensuite de se faire construire une nouvelle demeure plus vaste que la précédente, dont il confia la construction à l’architecte Cartould.

Celle-ci achevée, il décida de compléter l’ensemble en faisant édifier une Orangerie dans ses jardins et il confia cette tâche à l'architecte du Duc d'Orléans : Gilles-Marie d’Oppenordt.

Façade est de l'orangerie;
Photo: société d'Histoire.
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Pourquoi construire une Orangerie ? C’est que la culture de l’oranger fut la grande passion de l’Europe des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, et, dès l'introduction des premiers plants de ce fruit sur le Vieux Continent au XVIe siècle, on commença l’édification de bâtiments spécialement aménagés afin de permettre la culture de ce fruit, car cet arbre fragile ne résiste pas aux gelées.

On eut alors l’idée de le mettre en caisse et de le transporter chaque hiver dans un bâtiment fermé au vent froid du Nord, ouvert au midi sur la lumière et dont les parois épaisses, les fenêtres bien ajustées, permettraient d'y maintenir une température à peu près constante. Dès le début du XVIIe siècle, les jardins des Grands de l’époque commencent à être pourvus d’une Orangerie. Cette mode ne pouvait que s'étendre au Grand Siècle, et, de fait, les orangers devinrent le décor habituel et pratiquement obligatoire des jardins à la française.

Crozat, personnage considérable du monde de la finance au XVIIIe siècle, l’un des hommes les plus riches du royaume, qui possédait, on l’a vu, une propriété au pied de la colline de Montmorency, ne pouvait pas ne pas avoir une Orangerie dans ses jardins. C’est donc tout naturellement qu’en 1719, il demanda à Oppenordt d’en construire une. C’est grâce à une autorisation de voirie du 14 mai 1719, obtenue du prince de Condé que cela fut possible. En effet, avant de pouvoir commencer les travaux, il fallait obtenir du seigneur de Montmorency, le prince de Condé, l’autorisation de détourner le chemin qui conduisait à Saint-Denis et Paris ; ce qui fut accordé.

C’est dans l’angle sud-ouest de la propriété qu’elle fut bâtie. C’était un bâtiment circulaire tourné vers l’est, orné de trois arcades à bandes avec des masques à leur clé. Elle avait également un très beau fronton orné d’un lion monté par un enfant qui surmontait la principale arcade. Ces ornements ont aujourd’hui disparus ainsi que les portiques de colonnes classiques qui décoraient les arcades latérales.

Façade ouest, côté rue du Temple;
Photo: société d'Histoire.
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Cette construction très élégante fut défigurée au XIXe siècle par l’adjonction d’un étage et sa conversion en locaux d’habitation.

En 1883, elle fut transformée en établissement scolaire : l'abbé Chalumeau y installa son école Saint-Augustin. La même année, fut percée une nouvelle artère que l’on appela évidemment boulevard de l’Orangerie.

Trois ans plus tard, elle subit une nouvelle transformation : son nouveau propriétaire en fit un parc d’attraction comportant un restaurant, une salle de bal et de concert, un grand manège où l’on pouvait recevoir des leçons de dressage et d'équitation. Dans ce parc, il y avait également un lac, reliquat probable d’une des nombreuses pièces d’eau que comportait le parc de Crozat, sur lequel les Parisiens en villégiature à Montmorency pouvaient faire du canotage. Bref, le tout formait une sorte de petit «Luna Park» assez pittoresque.

Position de l'orangerie;
Photo: société d'Histoire.
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Mais cela ne dura.pas : la fontaine Saint Valéry qui alimentait le lac ayant été détournée, celui-ci dut être comblé pour des raisons sanitaires en 1904 et le parc acquis par un spéculateur, Boudin, fut loti.

Quant à l’Orangerie, redivisée encore une fois en appartements, elle prit l’aspect que nous lui connaissons aujourd’hui ; celui d’un bâtiment témoin d’un brillant passé mais défiguré et menacé de disparition.

Nous espérons que nos recherches, qui ne font que commencer, seront un prélude à un futur projet de rénovation du seul bâtiment de cette époque subsistant à Montmorency.

Didier Le Ferrand

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