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Quand la rue Carnot s'appelait rue du Crucifix

À Montmorency, au XVIIIe siècle, sur les principaux chemins menant au village, s'élevaient des croix de carrefour. Le plan établi, pour le Prince de Condé juste avant la KRévolution, en indique plusieurs : à l'arrivée du Pavé de Groslay (actuel carrefour rue de Groslay-rue Notre Dame} se dressait La Croix du Petit Groslay tandis que la Croix Moreau marquait, sur la Place Venise, l'arrivée du Chemin de Saint-Brice et que des deux voies venant de la vallée passaient, l'une (celle qui venait de La Barre) par la Croix des Granges, l'autre par la Croix des Mathurins érigée devant l'hôpital actuel, au départ de la rue du Marché,

Mais, selon Julien Ponsin, à l'époque de Louis XIII, existait juste à l'entrée du viliage (carrefour rue Carnot – rue Saint-Jacques) une autre croix. Il s'agissait d'uu grand crucifix en bois reposant sur un socle de pierre, au milieu du carrefour, dans une zone non encore construite : la rue de Clairvaux n'existant pas encore et les maisons de la rue Carnot n'atteignant pas ce point. Vers le milieu du XVIIIe, les constructions devenant plus nombreuses et la rue Carnot étant bâtie en sa totalité, la croix fut alors enlevée et remplacée par un crucifix logé dans une niche ménagée à la base du premier étage de la maison sise à l'angle de la rue Saint-Jacques (l'actuelle Maison de la Presse) : la rue prit alors le nom de Rue du Crucifix.

Cette dénomination fut, au cours du XIXe, modifiée plusieurs fois, au gré des évènements politiques.

Débaptisée sous la Révolution, elle redevint rue du Crucifix sous la Restauraion, ainsi que l'attestent les archives municipales pour 1820 et 1822 ; toutefois, lors de sa délibération du 10 mai 1827, le Conseil municipal, qui fixait alors la nomenclature des rues, attribua à la voie joignant la Place du Marché à la rue Saint-Jacques le nom de rue de Montmorency.

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Cinquante ons plus tard, en 1874, (c'est alors la période dite de «l'Ordre Moral». réaction qui suivit le Commune et se traduisit, entre autres manifestations. par le rapprochement de l'État et de l'Église) cette voie reprit officiellement le nom de Rue du Crucifix, appellation que la population avait, semble-t-il continué à utiliser.

Mais, elle ne portera ce nom que vingt ans! En effet, après l'assassinat du Président Sadi Carnot à Lyon le 24 juin 1894, assassinat qui eut dans toute la France un énorme retentissement, le Conseil Municipal de Montmorency prit plusieurs décisions : d'abord (décision du 7-7-1894), la réduction au stricl minimum des cérémonies du 14 juillet suivant; ensuite (vote du 19-9-1894), une participation à la souscriplion lancée en vue de l'érection d'un monument commémoratif à Lyon, enfin, lors de sa réunion du 13-11-1895 « la proposition de plusieurs membres et après en avoir délibéré, le Conseil décide que la rue du Crucifix portera désormais le nom de rue Carnot». Il n'y a donc plus de rue du Crucifix!

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Mais, le crucifix, lui, est toujours là, dens sa niche, dans l'Entreprise de Peinture et Papiers Peints que Monsieur Labsolu a cédée en Janvier 1889 à son premier commis : Monsieur Léon Forget. Celui-ci l'y maintiendra jusqu'en 1904, mais l'enlèvera cette année-là car le climat politique est à nouveau troublé : la Gauche au pouvoir avec Waldeck Rousseau depuis 1899, a choisi une politique hostile à l'Église, politique que le succès des Radicaux en mai 1902 à amplifiée ; le ministère Combes a engagé la lutte avec les Congrégations (la loi du 7 juillet 1904 leur interdira d'enseigner) puis avec la Papauté et a rompu, le 36 mai 1904, les relations diplomatiques avec le Vatican.

Montmorency n'est pas resté à l'écart du débat politique national et les élections municipales de mai 190a, qui assurent la victoire de la liste radicale menée par Théophile Vacher, ne se sont pas déroulées dans le calme ; une partie de la population réclamant l'enlèvement du crucifix el manifestant son mécontentement en lançant chaque nuit dans la niche et à côté! détritus, immondices ou peinture rouge. C'est alors que Monsieur Forget, las de ne pouvoir dormir tranquille et d'avoir à nettoyer chaque matin devant sa porte, finit par enlever le crucifix.

Les témoignages de Madame Leproust, petite-fille de Monsieur Léon Forget et de Madame Jean Forget, sa belle-sœur, ne laissent aueun doutes à ce sujet et permettent de situer l'évènement vers le milieu de 1904, car Monsieur Léon Forget, en août de cette même année, a acheté la maison sise au 19 rue Carnot, y a transféré son entreprise en emportant le crucifix.

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Après 1904, il ne subsiste que la niche, vide, sur le fond de laquelle a été peinte une croix que la famille Forget refait régulièrement. Cette niche dont se souviennent les anciens Mortmorencéens, parfaitement visible sur les anciennes cartes postales représentant l'épicerie tenue par Monsieur et Madame Sauvage, n'a pas été détruite ; elle est simplement masquée, depuis 1966, par les plaques de marbre de la Maison de la Presse. Quant au crucifix, resté dans la famille de Monsieur Forget, il a été offert en décembre 1983 à la Société d'Histoire de Montmorency par Madame Jean Forget et sa famille à qui nous renouvelens ici nos remerciements, espérant voir bientôt la création d'un Musée du Vieux Montmorency dans lequel ce crucifix trouverait sa place parmi d'aulres souvenirs de notre passé.

J. Rabasse

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