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Guillaume de Montmorency

Introduction

Pourquoi écrire sur le baron Guillaume de Montmorency. La raison la plus évidente est de le faire connaître, car si son fils Anne, le grand connétable, a fait l'objet d'études (et encore pas autant que son rôle dans l'histoire de France aurait pu le laisser espérer) rien n'avait été fait sur son père. Et pourtant le rôle de Guillaume dans l'établissement de sa Maison comme dans la formation de son fils a été capital. Cette étude aura le mérite sinon de révéler des documents inédits, du moins de rassembler des renseignements épars et de replacer l'initiateur de notre collégiale dans son époque.

Nous profiterons de cette étude pour donner quelques éclaircissements sur Jean II de Montmorency, le père de Guillaume, regroupant ainsi dans la même étude les deux premiers occupants de notre église paroissiale.

La France à l'époque de la naissance du Baron Guillaume

Guillaume naît en 1451 ou en 1452, la date n'est pas sûre. Cette année n'offre pas d'intérêt particulier pour elle-même. sinon qu'elle se trouve placée au cœur d'une époque vraiment passionnante qui marque, pour la France. à la fois, la fin d'un monde et la naissance d'un autre bien différent. Qu'il nous soit donc permis de brosser un rapide tableau de ce milieu du XVe siècle, si passionnant pour l'historien.

La fin de la guerre de 100 ans

La trêve de Tours. en 1444. a vu la conclusion des fiançailles du roi d'Angleterre Henri VI avec Marguerite d'Anjou, la fille du roi René. cousin du roi de France. Mais la politique d'entente. soutenue à la fois par Marguerite d'Anjou et par un conseiller du roi d'Angleterre le marquis de Suffolk, se heurte au nationalisme anglais. Tergiversations. discussions. ambassades contradictoires se succédent sans résultat, si bien qu'en 1448 Charles VII se saisit du Maine, qu'Henri VI avait promis à René d'Anjou. En 1449. c'est la conquête de la Normandie, berceau de la couronne d'Angleterre. À la bataille de Formigny. l'armée française, réorganisée, prend sa revanche sur les défaites du passé. Cherbourg tombe le 12 août 1450. L'Angleterre est en plein désarroi. Suffolk est assassiné sur le bateau qui l'emmène en France.

La même année voit le début de la reconquête de la Guyenne qui se poursuit l'année suivante avec Dunois, Le 20 août 1450. Bayonne, dernière ville anglaise du sud-ouest, se rend. En 1453 les bordelais, déçus de l'administration française, se révoltent avec l'aide des anglais. Is sont écrasés à Castillon (1) . L'anglais est définitivement «bouté hors de France» selon le souhait de Jeanne d'Arc et seul Calais reste en sa possession. La guerre de 100 ans commencée en 1337. se termine donc cette année là où Guillaume voit se terminer également sa première année d'existence.

La paix et le temps des réformes

Une fièvre de reconstruction saisit alors le royaume de France. Les seigneurs fonciers, laïcs ou religieux recherchent ardemment des remplaçants aux tenanciers que la guerre a fait fuir. Tout est fait pour relancer les cultures, le paysan, devenu rare, n'a jamais été autant cajolé. Il bénéficie de la baisse des redevances et voit même la participation des seigneurs à la remise en culture des terres délaissées.

Le Roi Charles VII met à profit ces années pour réorganiser son royaume et particulièrement ses deux piliers essentiels que sont l'administration (où allait briller le futur baron) et l'armée.

Si la guerre de 100 ans avait ralenti et parfois mis en péril l'unification du royaume au profit des capétiens, elle ne l'avait jamais arrêtée. L'administration royale, même affaiblie, était restée la pierre angulaire de cette organisation. Charles VII, conscient de son importance, l'unifia et la perfectionna. Il y gagna le surnom de «Bien servi». Pour asseoir sa politique, il lui fallait bien évidemment de l'argent. On attribue à ce roi la création de l'impôt remplaçant les aides ponctuelles jusqu'àlors perçues seulement en cas de difficultés du royaume. Passant outre les doléances et les velléités d'indépendance des États, à partir de 1439, le roi, fixe lui-même le montant de la taille et rend permanent, les Aides et la Gabelle.

Après l'administration, l'autre soutien de sa politique était l'armée. Il fallait avant tout écarter la menace mortelle des mercenaires qui, sans guerre donc sans solde, vivaient sur le pays. Leurs chefs se considéraient comme de véritables seigneurs de la guerre, œuvrant pour leur propre compte (2) .

Il fallait, ensuite s'assurer d'un véritable corps de bataille permanent, constituant un «noyau dur» autour duquel viendraient, en cas de besoin, des mercenaires et non l'inverse comme cela était l'habitude auparavant. En 1439, une ordonnance royale institue le monopole du souverain en matière de recrutement, limitant les compagnies à 100 lances garnies (environ 500 hommes) fixées sur des garnisons. Les frais d'entretien sont dévolus aux villes. Pour la première fois en occident, un roi maintient une armée en temps de paix. En 1448, ce sera un corps de fantassins qui sera créé, les francs-archers, chaque communauté devra en entretenir un pour 50 feux.

Dans ce contexte de retour au calme et de réformes administratives, le servage recule dans les campagnes et dans les villes les artisans se regroupent en «Métiers» organisés. Une véritable industrie se met en place par les liaisons multiples qui se tissent entre les villes drapantes du nord et les riches cités italiennes. En France, Jacques Cœur est le symbole du retour à la prospérité. Voyageur infatigable, il sillonne le monde. Financier habile il devient immensément riche. Hélas, parmi ses débiteurs se trouve le Roi lui-même et Jacques Cœur apprend vite qu'à «cœur vaillant rien d'impossible» sauf peut-être à se tenir au-dessus de la justice d'un Roi jaloux. En 1451, la porte des prisons royales se referme sur lui, l'année même, encore une fois, de la naissance du futur baron.

Hors d'Europe, si les portugais ont atteint la Guinée et son or, la grande nouvelle est d'abord la prise de Constantinople par les Turcs en 1453, date qu'ont choisi les historiens pour marquer la fin du Moyen-Age.

Enfin, cette période, que nous pouvons qualifier de transition, marque le début d'un changement profond dans les mentalités populaires. On commence à penser non plus en termes de liens féodaux mais en termes de Patrie. Que l'on y songe : la mort de Jeanne d'arc précède de 21 ans à peine la naissance de Guillaume et 10 ans, dans l'autre sens, séparent cette même naissance de l'arrivée au pouvoir de Louis XI, premier roi «moderne», gestionnaire plus que chevalier.

Le temps de la féodalité et de l'indépendance des grands seigneurs est révolu. Celui où une carrière s'organise autour du Roi est venu. Tant que les Montmorency serviront fidèlement le monarque, leur fortune sera assurée mais celle-ci les abandonnera quand leur fidélité sera défaillante.

C'est donc dans cette France à la fois pacifiée et en pleine mutation qu'est né et a grandi celui qui, on va le voir, était loin de penser à l'époque qu'il serait un jour le baron Guillaume de Montmorency. Et puisque le jeune homme, promis par son rang de naissance à une existence obscure, dut sa promotion à son père, qu'il nous soit permis, avant d'aller plus loin de dire quelques mots de celui-ci.

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Jean II de Montmorency

Jean II est né vers 1400. Il est le fils de Jacques II, baron de Montmorency, sa mère est Philippe de Melun. Celle-ci meurt en 1421. Nous ne savons rien de l'enfance du jeune baron. En 1422, l'année de la mort de Charles VI, il épouse Jeanne de Fosseux, riche héritière de Flandres. La situation de la France est alors catastrophique. Il faudrait d'ailleurs parler de «Frances» au pluriel car il existe alors une France anglaise au nord et à l'ouest et une France bourguignonne à l'est. Le dauphin Charles, que même sa mère désavoue et dont elle met publiquement en doute la filiation avec Charles VI, a été dépossédé de son héritage au traité de Troyes (1420). Il ne possède plus que quelques terres au sud de la Loire et quelques alliances personnelles. Sa situation est désespérée. C'est pourtant lui que Jean de Montmorency choisit de suivre. Flair exceptionnel ? Fidélité aveugle ? Le fait est que le choix est bien hasardeux. En 1425, le Baron devient chambellan de France, d'une France qui s'enfonce dans le malheur. Peste noire, routiers, en 1429, on touche le fond. Les dernières villes du dauphin sont tombées, Bedford est sous les murs d'Orléans et soudain le miracle ! Le roi rencontre une jeune fille de 17 ans, venue des lointaines marches de Lorraine. Le 8 mai 1429 Jeanne d'Arc délivre Orléans, le 18 juin c'est Patay, le 17 juillet enfin le dauphin est sacré roi à Reims. Henri V, faute de pouvoir faire mieux, châtie aussitôt le baron Jean de sa fidélité. Tous ses biens sont confisqués et donnés à Jean de Luxembourg (3) et (4).

Jeanne d'Arc et Charles VII
Jeanne d'Arc et Charles VII, à leur première entrevue.
Tapisserie en laine du XVe siècle.
(Orléans. Musée Jeanne-d'Arc)

Jean II participe à toutes les actions menées par le roi de France pour reconquérir son royaume. Nul doute qu'il chevauche alors aux côtés de Dunois, de La Hire et de Gilles de Rais son lointain cousin. En 1430, il participe à des attaques contre Paris (assaut de la Porte Saint-Honoré) (5) où il est fait chevalier. Le feu du combat lui fait oublier un drame personnel, la mort de sa femme en 1431. Cette année là une autre femme meurt sur la place du marché à Rouen.

En 1435, le 21 septembre c'est le traité d'Arras, la Bourgogne bascule du côté français. Paris est pris. Jean devient commandant de la place de Pontoise, prise et reprise et qui resta longtemps un ancrage important des Anglais en Île de France. En 1445, il suit le roi à la reconquête de la Normandie et récupère ses terres de Damville. En 1449, il se remarie avec Marguerite d'Orgemont, petite fille du célèbre Pierre Ier d'Orgemont, conseiller du roi Charles V. Sa nouvelle femme lui amêne un héritage et des «espérances» considérables. Elle lui donnera 3 enfants : un garçon Guillaume, deux filles, Philippe et Marguerite.

Lorsqu'en 1461 Louis XI devient roi, il gardera sa charge de chambellan, preuve rare de l'estime que lui gardait le nouveau monarque. On connaît la hargne avec laquelle ce dernier poursuivit les anciens serviteurs de son père. Louis XI lui fera même l'honneur, en 1470, de venir dans sa maison. En 1472, se place l'épisode, raconté plus loin, de l'exhérédation des deux fils qu'il avait eu de Jeanne de Fosseux. Il meurt le 6 juillet 1477 et il est inhumé seul dans l'église Saint Martin (sa femme, Marguerite qui mourra elle en 1481, sera enterrée à Senlis, fief des Orgemont).

Gisant de Jean II
Le gisant de Jean II de Montmorency.

Cy gist noble et puissant seigneur mos mess Jehan de Motmorency premier baron de France jadiz sr dud Motmorency et de Danville d'Escouen de Vitry de Conflant et de la Tour au Begue conseillir et chanbellan du roy nre s qui trespassa le VIe de juillet l'an mil CCCCLXXVII.
Priez Dieu que pardon lui face A.I.E.
Amen.

Son tombeau sera le premier construit dans notre collégiale. Jean II reposait sous une lourde plaque de cuivre repoussé. Cette tombe, archaïque déjà pour l'époque, le rattache tout-à-fait au moyen âge. Le baron est représenté, revêtu de son armure. Son épée bascule derrière lui, rompant avec la tradition qui voulait qu'elle soit allongée aux côtés du défunt. Ses pieds sont placés sur un lion rugissant, symbole de la force et du courage. Cette gravure du XVIIe siècle est la seule représentation que nous ayons du Baron Jean. La plaque de cuivre sera fondue sous la Révolution.

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Enfance et jeunesse de Guillaume de Montmorency

Le futur baron (qui, justement, nous l'avons vu, n'avait à cette époque aucune chance de devenir baron) a 9 ans lorsqu'en 1461 Louis XI monte, enfin, sur le trône de France. Jamais sans doute, dauphin royal n'avait attendu avec autant d'impatience la mort de son auguste père. Il avait tout juste 18 ans quand, déjà, il avait levé ses armes contre lui. Il en a 38 maintenant quand arrive la nouvelle de ce décès tant espéré. Depuis 20 ans il ronge son frein, complote avec tous les ennemis de la France et rêve de pouvoir. Seule sa piété, qui contraste avec les débauches de son père, l'empêcha, peut être de devenir roi plus tôt. Machiavel, en écrivant «Le Prince», se servit de César Borgia comme modéle. Louis XI aura encore mieux le goût de la puissance, le mépris des hommes qui lui cêdent et la haine de ceux qui lui résistent. L'intelligence est aussi aiguë que le personnage est tourmenté. Sa principale qualité est celle de tous les grands de ce monde : la tenacité. En face de lui, se dresse un grand seigneur, affolé d'orgueil, auquel ne suffit plus le titre de duc dont il attend, lui aussi, l'héritage. Il veut devenir roi et recréer l'éphémère empire de Lothaire. C'est Charles, Comte du Charolais, que l'on commence à appeler «le Téméraire». Louis XI le connaît très bien puisqu'il fut son compagnon de jeunesse lorsque, dauphin de France, il était réfugié chez son pére Philippe le Bon. Il est même le parrain de sa fille Marie. Les jugements qu'il porte sur lui sont loin d'être élogieux : il a, d'après lui, «Peu de valeur, bien peu de jugement. il est orgueilleux, très coléreux et comme une sorte de bête».

Entre eux l'affrontement était inévitable. Quelques années passent. En 1465 de grands féodaux tentent de se débarrasser d'un roi devenu à leurs yeux beaucoup trop royal. À leur tête, bien sûr le Comte du Charolais. C'est la «Ligue du bien public (6) . Le propre frère de Louis XI, le duc de Berry en fait partie. On peut y voir la traditionnelle haine du cadet envers l'aîné. Le roi mobilise, aussitôt, le ban et l'arrière-ban pour courir sus aux félons. Parmi ses vassaux fidèles, le père de Guillaume, Jean II répond à l'appel. Mais il est vieux et perclu, l'ancien compagnon de Jeanne d'Arc. Il demande à ses fils aînés de le remplacer auprès du roi. À sa consternation et à son indignation, Jean de Nivelle et Louis de Fosseux cèdent aux sirènes bourguignonnes. Ils sont bien sûr, vassaux du roi de France mais ils le sont également du duc de Bourgogne. Dans leur choix de leur Homme-lige, ils marquent nettement leur préférence pour leurs fiefs de Flandres que leur a légué Jeanne de Fosseux, leur mère.

De plus, suivre l'hypothèse bourguignonne leur a, certainement, paru beaucoup plus porteur d'avenir que la, encore, très fragile. couronne de France. Toujours est-il qu'ils refusent de se rendre à l'appel royal (7). De là l'expression populaire «Faire comme ce chien de Jean de Nivelle qui s'enfuit quand on l'appelle».

Le Baron Jean est froissé dans son orgueil paternel et sans doute encore plus dans le mépris de la tradition familiale de fidélité absolue qui, depuis les premiers Bouchard, unit la famille de Montmorency au Roi de France.

Le château de Rochepot
Le chateau de la Rochepot en Bourgogne.

Guillaume, lui, n'hésite pas à se ranger aux côtés du suzerain de son père. Après la victoire royale, Jean II décide alors de récompenser le fils obéissant. Il l'institue héritier universel de ses biens par un acte en date de 1472. Acte confirmé par le roi qui reçut «l'heureux héritier» «a foy et hommage lige, comme de fief mouvant nuement et plainement de sa couronne» le 28 octobre de la même année (8) . Et donc le jeune Guillaume (il n'a, après tout, que 14 ans) fit en cette occasion, ses premières armes.

Malgré cette preuve évidente de fidélité, Louis XI ne l'aimait pas. Pourquoi ? En fait, le roi se méfiait de toutes les familles nobles de l'époque, qui lui avait manifesté le plus profond mépris dans sa jeunesse. Lui, le pauvre dauphin, élevé à Loches par des domestiques.

Le futur Baron comprit rapidement qu'il fallait chercher fortune et formation ailleurs. Il devint alors, conseiller, chambellan et écuyer de l'héritier du bon roi René, Charles d'Anjou, roi de Naples, comte de Provence, avec 10 000 écus de prime. Le comte est riche. En effet, René a déshérité pour lui son peti-fils, espérant de cette manière protéger ses terres de la rapacité de Louis XI. Sans succès d'ailleurs puisque à sa mort, en 1480, bientôt suivie de celle de son neveu en 1481, la Provence, l'Anjou, le Bar, la Lorraine, tombèrent dans l'escarcelle du roi Louis. Mais René d'Anjou était aussi roi de Naples et de Sicile. Ceci devait servir à Charles VIII puis à Louis XII de prétexte pour leurs expéditions lointaines en Italie.

Ces vicissitudes ont sans doute écarté Guillaume des évènements qui ont marqué la fin du Téméraire, ainsi que la liquidation laborieuse de son héritage. Mais dès son retour à la cour de France après la mort de son protecteur, le jeune baron ne reste pas inactif. Il s'attache à Anne de Beaujeu, fille aînée de Louis XI, qui deviendra, associée à son mari Pierre de Bourbon, Madame la Grande, comme l'appelaient ses contemporains, fut une grande régente. Elle sut discerner les mérites de Guillaume, et dès 1483 celui-ci devint conseiller et chambellan du jeune roi. L'année suivante, en 1484 il eut l'insigne d'honneur d'être choisi comme représentant de la noblesse aux États Généraux de Tours, pour la prévôté et vicomté de Paris (8).

Cette année 1484 est une année vraiment faste pour le baron de Montmorency, qui agrandit son patrimoine de façon considérable par un héritage important. Sans descendant, Pierre III d'Orgemont, le frère de sa mère, Marguerite d'Orgemont, l'institue légataire universel. Les terres de Montjay, de Montepilloy, Chavercy et surtout de Chantilly (9) viennent s'ajouter aux seigneuries et fiefs de Guillaume déjà fort nombreux. Sans doute, parce qu'un bonheur ne vient jamais seul, cette même année, au mois de juillet, il épouse Anne Pot sa cousine au 5e degré. Sa jeune épouse est la fille de Guy Pot (10) Comte de Saint-Pol et de Marie Villiers de l'Isle-Adam,elle lui amène le riche héritage des Pot et la promesse de la succession des Villiers.

Bientôt un premier fils naquit de cette union, Jean, qui fut longtemps appelé Monsieur d'Écouen, dans l'attente du titre de baron que sa mort en 1516 ne lui permit jamais de porter. En 1489, nouvelle naissance pour le jeune couple, une fille cette fois, Louise. Celle-ci épousera plus tard en deuxième noce Gaspard Ier de Coligny, ses enfants, issus de ce mariage, seront les principaux adversaires de son frère le Connétable Anne.

Enfin, en 1493, naît à Chantilly, celui qui devait porter au plus haut l'honneur de sa race, Anne, le futur connétable. (Afin de ne pas alourdir inutilement le récit nous renvoyons en notes les quelques renseignements que nous possédons sur les autres enfants du Baron Guillaume).

Un tournois
Un tournoi au XVe siècle.
Miniature d'un manuscrit de Froissart.
(Londres — British Museum).

Le 16 septembre 1493, nous retrouvons Guillaume comme juge de combat au pas d'armes de Sandricourt (11). Puis l'année suivante, Charles VIII, qui nourrit des prétentions sur le royaume de Naples, en tant qu'héritier de René d'Anjou, l'entraînera avec lui de l'autre côté des Alpes.

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Les guerres d'Italie

Le rêve italien du roi de France coûtera cher à ses sujets puisqu'avant de partir, le roi assure ses arrières en achetant la neutralité du roi d'Angleterre contre 745 000 écus d'or, du roi d'Espagne contre le Roussillon, celle enfin de Maximilien d'Autriche contre l'Artois et la Franche-Comté. L'influence d'Anne de Beaujeu et de son mari est incapable de refréner l'ardeur du jeune roi. Tout l'incite à se lancer dans une aventure que l'on peut qualifier de folle. Son esprit aventureux, nourri de romans de chevalerie est bien loin du pragmatisme froid de son père, l'appel des italiens eux-mêmes et même un esprit de croisade qui ne trouve plus de but. La mort, en 1484, du roi de Naples va lancer l'action.

Charles VIII a écarté les conseillers hostiles au projet. On peut donc considérer que Guillaume ne l'était pas puisqu'en ce début de l'année 1494, il faisait parti de l'armée qui se réunit à Lyon.

Le roi de France traversa alors les Alpes, rencontra le pape Alexandre VI Borgia et pénétra enfin dans Naples le 22 février 1495. La victoire fut sans lendemain, la ligue de Venise devait obliger l'armée royale à revenir vers le nord de l'Italie puis rapidement en France. L'année suivante, Gilbert de Montpensier capitulait à Naples devant les Espagnols de Ferdinand d'Aragon. Charles VIII préparait une nouvelle expédition quand il mourut, subitement, le 2 avril 1498, à Amboise.

Louis xii et Anne de Bretagne
Luis XII et Anne de Bretagne.
Mdaille conservée à la Bibliothèque Nationale.

Guillaume assiste, alors au couronnement de Louis XII. En ce deuxième jour de juillet 1498 le roi fit une entrée triomphale à Paris. Guillaume marche en tête du cortège avec les comtes de Nassau, de Dunois, de Guise, de Montpensier de Ligny ; les seigneurs de la Trémouille, de Piennes, de Chaumont et autres, «tous si richement habillez, et sompteusement montez sur coursiers et genétz

(12) bardez de draps d'or, et à papillotes de fils d'or, et autres couleurs que c'était chose inestimable à voir et comprendre».

Avec l'arrivée du nouveau roi, Guillaume connaît une reprise de son influence, fortement diminuée dans les dernières années du rêgne de Charles VIIT. Les honneurs ne cessent de s'accumuler sur sa tête :

Guillaume devient ensuite Conseiller et Chambellan ordinaire de la Maison du roi, est fait Gouverneur du Duché d'Orléans. La même année il hérite de messire René Pot, frère unique d'Anne Pot, sa femme, après en avoir dédommagé le neveu. Son patrimoine s'accroît des seigneuries de Damville, de la Rochepot, de Châteauneuf, de Thoré, de la Prune-au-Pot et autres. En 1504 il acquiert les fiefs de Charnelles et de Aumère. (13) .

Pour le reste il se passa peu d'années avant que Louis XII ne reprenne à son compte les mirages italiens de ses prédécesseurs. À l’objectif napolitain de Charles VIII s’ajoute alors le Milanais auquel son ascendance Visconti lui donnait droit. Le duché de Milan fut, donc rapidement conquis. Mais à Naples, le roi de France se heurte à Frédéric d'Aragon-Castille et l’héroïsme de Bayard sur la Garigliano n’empéchera pas la retraite de l’armée française.

Entrée de Charles VIII à Naples
L'entrée triomphale de Charles VIII
à Naples le 13 mai 1495.

La guerre reprit à l’instigation du Pape Jules II qui appela le roi de France en 1509 pour le lancer contre Venise. Celle-ci défaite, le pape, pour chasser les français mit sur pieds, la Sainte ligue... Venise. Après avoir perdu le milanais, le roi de France dût céder, sous la menace d’une invasion. La fin de la guerre fut facilitée par la mort de Jules II en 1513. Guillaume ne participa pas à cette expédition et resta comme nous le dit du Chesne, «au timon de l'état»,c’est-à-dire au conseil d’Anne de Bretagne. Notre baron eut la peine de perdre en 1510 (14) sa dévouée femme dont le corps fut enseveli dans la collégiale Saint-Martin à Montmorency et le cœur dans l’église des cordeliers à Senlis. La même année, il marie son fils aîné Jean, échanson de Louis XII, avec Anne de Boulogne, dame de Montgascon, veuve de Charles de Bourbon, comte de Roussillon, amiral de France. Il lui donne comme prérogative d’aînesse, la baronnie de Montmorency, la seigneurie d’Écouen, de Chantilly.

En 1513, Anne de Bretagne meurt, Guillaume assiste, consterné aux funérailles de la marraine de son fils Anne, qui lui doit son prénom. Le roi se remarie, épousant Marie la sœur de Henri VIII. Mais il meurt deux ans après, sans attendre les 300 canons de Marignan, que son neveu François fait retentir comme une fanfare annonciatrice de son rêgne.

Guillaume reçoit sa part du triomphe, François Ier nomme Capitaine du château et donjon du bois de Vincennes. Concierge et garde de la tour de Beauté-sur-Marne. La reine-mère Louise de Savoie, Duchesse d'Angoulême, le choisit comme chevalier d'honneur, enfin le roi le décore de l'ordre de Saint-Michel. Il assiste au mariage du roi avec Claude de France et dirige le cortège royal qui fait son entrée solennelle dans leur capitale.

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La vieillesse et la mort

Mais son âge commence à lui peser, une paralysie des membres supérieurs l'handicape beaucoup, il lui faut, maintenant penser à s'assurer une dernière demeure digne de son rang. Nul doute qu'il ait d'abord pensé à la chapelle du château de Chantilly pour laquelle il avait obtenu du pape Léon IX, le droit d'y faire célébrer la messe. Mais l'église du berceau de sa famille s'impose très vite. Son père y est inhumé, sa femme également. Malheureusement l'église, construite au XIIe siècle tombe en ruines. Il faut penser à la reconstruire. D'après les dernières recherches faites sur la collégiale, 1515 marque le début de la reconstruction du chœur, tâche à laquelle s'est limité Guillaume. (La nef sera l'affaire de son fils Anne).

Grâce aux savants ouvrages de M. Baillargeat, nous savons tout sur la construction du chœur et du tombeau. Sur la foi de A. du Chesne et du célèbre tableau de Guillaume conservé au Louvre, la date de 1525 a longtemps été retenue comme la date du début de la reconstruction de la Collégiale. Il semble que ce soit plus vraisemblablement la date de la finition du chœur. M. Baillargeat a publié divers documents dont le contrat passé entre le Baron Guillaume et le charpentier de «haute cognée» de Beaumont en date de l'année 1520, ce qui suppose que la maçonnerie soit en place à cette date. À la mort de Guillaume, en 1531 «son œuvre restait inachevée. Les nouvelles constructions ne comprenaient que l'abside, les quatre premières travées; l'élégant clocheton et le petit portail septentrional. Elles abritaient un chœur fermé par une clôture de pierres, cinq statues adossées aux piliers, les tombeaux de Jean II, de Guillaume et de Anne Pot, ainsi que douze magnifiques vitraux et le portail du fondateur» (15).

Guillaume en 1530
Guillaume DE MONTMORENCY vers 1530
(Dessin) Musée Condé Chantilly.

Quant au tombeau lui-même, il est situé à la hauteur de la 2e et de la 3e travée. Guillaume, dans un premier temps, avait choisi Martin Cloistre (1480-1524), sculpteur dauphinois, qui était l'auteur de la tombe du maréchal de Chatillon, gendre du Baron, époux de sa fille Louise et qui était mort en 1522. La date de la disparition du sculpteur indique d'elle-même qu'il ne peut être l'auteur du tombeau de la Collégiale. Le contrat passa alors à Benoît Bonberault, un orléanais. Hélas, lui aussi meurt en 1525 et ne peut donc être l'auteur que d'une faible partie du tombeau. C'est enfin à Mathieu le Moyne et à Jean de Riviere que le Baron adressa en 1527 et 1528 pour terminer son monument funéraire. Le premier est l'auteur de la table de marbre noir qui est actuellement fixée au bas côté de la collégiale, le deuxième, des statues des côtés du tombeau dont malheureusement il ne reste rien. Sur le marbre noir étaient couchés le Gisant du Baron et sa femme, en marbre blanc et sur les côtés figuraient les douze apôtres.

Anges
Anges portant le collier de l'Ordre de Saint-Michel.
D'après une miniature tirée d'un manuscrit de la fin du XVe siècle
(Bibliothèque Nationale — Estampes)

Pendant qu'il songeait ainsi à s'immortaliser dans la pierre, le Baron n'en continuait pas moins sa moisson d'honneurs et de gloire. En 1516, il est fait chevalier de l'Ordre de Saint-Michel. Cet ordre, créé par Louis XI, distinguait 36 gentilhommes de nom et d'armes. Le grand Maître en était le Roi de France lui-même. Cette même année le Baron perd son fils aîné, Jean, héritier du titre. Il laisse deux enfants, Claude qui meurt à son tour en 1518 et une fille Louise qui ne survécut que quelques années.

L'année suivante au mariage de François Ier et de Claude de France, Guillaume marche au «plus près de leurs personnes».

Toujours en 1517, il reçoit la Cour à Écouen. Le jeune couple royal effectue à cette époque un long voyage de deux ans qui les mène à la découverte de leur royaume. Ce sera la dernière grande réception dans le vieux château féodal qui sera démoli et entièrement reconstruit par le Connétable après la mort de son Père.

C'est l'année où François voit la couronne impériale lui échapper. Le jeune Charles-Quint en bénéficie grâce à l'or des Fugger. Le plus puissant empire que l'Europe ait connu depuis Charlemagne, se constituait contre la France.

En 1520, tandis que François Ier essayait de se concilier le roi d'Angleterre au Camp du Drap d'Or, Guillaume réglait définitivement la succession de Pierre d'Orgemont avec son cohéritier Charles de Broullart à qui il laissait la seigneurie de Montjay, avec en plus 3 500 livres. Chantilly était définitivement à lui.

En 1522, il a 70 ans, âge vénérable pour l'époque. Il a gardé sans doute un mauvais souvenir de ses propres soucis de succession. Il décide alors, de partager de son vivant, la baronnie entre son fils François et Anne devenus la même année Maréchal de France et Chevalier de Saint-Michel. Au premier échoit le quart des domaines de Montmorency et d'Écouen, les Seigneuries de La Rochepot (dont il porte désormais le nom), de La Prune au Pot, de Chateauneuf, de Thôré. Le futur connétable, les 3/4 des domaines de Montmorency, d'Écouen, de Chantilly, de Damville, d'Offoy, de Chamecy, de Montepilloy, de Villiers près Creil.

Gisants du tombeau
Gisants du tombeau de Guillaume de Montmorency et Anne Pot.

Les Guerres d'Italie avaient repris. Elles débutaient mal, par une défaite française à La Bicoque. Le Milanais était perdu. L'ancien conflit d'intérêt qui opposait le roi à Charles de Bourbon, connétable de France, éclata à cette occasion. Depuis un certain temps François Ier tenait à l'écart des grandes affaires, le plus haut dignitaire militaire du royaume. La raison en était la haine (amoureuse, dit-on) de Louise de Savoie qu'augmentait encore, un procès d'intérêt (engagé cette année là) suite à la mort de Suzanne de Bourbon, entre la mère du roi et le connétable. En attendant les résultats du procès de la succession fut mis sous séquestre. C'en était trop pour le Duc, qui, depuis longtemps était en discussion avec l'Empereur. L'année suivante eut lieu encore une entrevue décisive avec le roi, sans résultat. Au mois de septembre, le connétable passa à l'ennemi. Cette «trahison», surtout par le contraste qu'elle fit avec la fidélité de Bayard), fait partie de l'imagerie populaire. Les manuels scolaires à la suite de Lavisse, en ont définitivement ancré le souvenir. C'est faire bon marché de l'esprit de la féodalité encore vivace à cette époque, Charles de Bourbon de sang royal, ne prenait pas le parti de Charles-Quint, il discutait d'égal à égal avec lui, comme il discutait avec son cousin le roi de France. Et de toute façon, tous les torts n'étaient pas de son côté. On peut légitimement se poser des questions sur la mise sous séquestre de ses biens qui donnait au roi la possibilité d'en percevoir les revenus au moment où il avait besoin le plus pressant d'argent.

Toujours est-il que Guillaume participa au conseil qui aboutit à la condamnation du Duc. La guerre faisait de nouveau rage en Italie et, bientôt, c'est Pavie. La défaite fut totale. Les pertes furent terribles. La noblesse de France en fut décapitée. Toute la charge de l'état retomba sur les épaules de la Reine-Mère, régente du royaume. Tandis que Anne et son frère La Rochepot, jouaient les ambassadeurs, Guillaume assistait Louise de Savoie, qui menait les négociations pendant la fin de l'année 1525. Pendant que ses fiefs de l'Isle de France et l'Abbaye de Maubuisson, où se trouvait sa fille Marie, était menacés par des mercenaires révoltés, c'est lui que le conseil de régence désigna pour s'occuper de la défense de Paris. Il assista également au traité de Moore signé entre Henri VIII et Louise de Savoie, qui garantit moyennant finances, la neutralité du roi d'Angleterre.

À cette époque, il a vu s'achever à Montmorency, le chœur de la nouvelle église. C'est la. partie, construite par Guillaume qui reste la plus belle, avec ses 12 vitraux. De son vivant il put contempler son œuvre avec satisfaction. Sa sépulture ne sera terminée que trois ans après, trois ans avant sa mort.

Sa gloire est maintenant un peu occultée par l'ascension rapide de son fils aîné. Anne est devenu Grand-Maître de France en 1526. Il remplace le Grand Bâtard de Savoie mort à Pavie. Cependant le vieux baron s'occupe encore de sa famille. En 1527 il rachète à sa nièce encore une partie de la baronnie, et en cette occasion le roi lui fait grâce des droits normalement perçus sur la vente.

L'année suivante la guerre reprend contre l'Empereur. Guillaume est dans la grande salle du Palais Royal de Paris, lorsque les envoyés de l''Empereur viennent «défier» le roi de France.

Sa dernière grande apparition en public, il la fera lors du couronnement d'Aliénor d'Autriche, le S5mars 1530, en l'église Saint-Denis.

C'est au château de Chantilly, un château que son fils a déjà profondément remanié, que le 24 mai 1531, le Baron Guillaume meurt, la même année que la Reine-Mère dont il fut si longtemps le fidèle conseiller. Il fut le dernier baron de Montmorency, la seigneurie fut en effet élevée en duché-prairie le 4 août 1551 et son fils Anne devint de ce fait le premier Duc de Montmorency.

Que de chemin parcouru depuis les derniers soubresauts de la guerre de 100 ans qui virent la naissance de Guillaume de Montmorency, jusqu'à sa mort qu'assombrit une guerre de religion à laquelle son fils va corsacrer toute son .énergie.

Le monde s'est agrandi. À l'est Bartolomé Diaz a doublé le cap de Bonne-Espérance, Vasco de Gama a ramené ses épices des Indes. À l'ouest Christophe Colomb a «découvert» l'Amérique, Balboa a appelé «Pacifique» un océan que Magellan va bientôt traverser. L'Empire aztèque s'est effondré sous les coups de Cortes et Pizzare «voyage» chez les incas.

En Europe, ce ne sont plus seulement des féodaux qui s'arrachent, sans fin, des fiefs, ce sont des idées qui séparent les peuples. L'année même de la mort de Guillaume, Henri VII consacre sa rupture et celle de son pays avec le catholicisme. La vie de Guillaume qui a commencé avec la construction des derniers châteaux-forts se termine avec celle de Chambord. Il a donc eu la chance de vivre une époque qui peut seule se comparer à la nôtre sur le plan des mutations fondamentales.

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Les enfants de Guillaume de Montmorency

La descendance de Guillaume de Montmorency

Notes

(1) Cette bataille mit fin à la longue carrière de John Talbot, éphémère maréchal de France dont HENRI VI se croyait le roi. Avec la mort de ce grand capitaine (qui fut le vaincu d'Orléans devant la Pucelle) c'est encore une figure symbolique de la guerre de 100 ans qui disparaît.

(2) Parmi eux, les célèbres «écorcheurs», dont l'activité criminelle atteint son apogée, pendant la dernière période de la guerre de 100 ans. On est surpris de rencontrer à la tête de ces bandits de grands chemins, un grand seigneur de notre région, Antoine de Chabane, seigneur de Dammartin, ami de Charles VII et de Louis XI et dont on peut voir le tombeau en l'église de Notre-Dame-du-Bourg à Dammartin:en-Goële. L'ordre de Saint-Michel qu'il porte sur la poitrine rappelle qu'il fut un des quinze premiers chevaliers de cet ordre, fondé par Louis XI.

(3) Jean de Luxembourg, Comte de Saint-Pol, lieutenant du duc. de Bourgogne, est celui qui livra, contre rançon, Jeanne d'Arc aux anglais et ce fut CAUCHON, évéque de Beauvais qui négocia la transaction.

(4) Cette confiscation fut de courte durée puisque Jean II retrouva ses biens dés 1430.

(5) C'est dans cette attaque restée sans lendemain que la Pucelle fut blessée.

(6) La ligue du Bien Public : La grande noblesse reprochait à Louis XI de faire passer l'intérêt du royaume avant celui de la grande noblesse. Ces féodaux considéraient encore le roi comme un des leurs et à l'inverse, au contraire celui-ci se méfiait d'eux. Au lieu de rechercher leurs conseils Louis XI ne s'entourait que de conseillers de petite extraction à qui il demandait avant tout d'être intelligents, disponibles et surtout dévoués corps et âme. La littérature romantique a brodé sur des personnages comme, Olivier le daim, Étienne du Loup etc... Leur pouvoir fut pourtant très réel.
Alors que l'administration royale devenait de plus en plus obsédante, le roi méprisait la vie de cour, ses fêtes et ses atours. En 1465 la colère de la grande noblesse éclata alors au grand jour. Cette révolte qui avait surtout pour but de défendre les intéréts des Grands prit le nom usurpé de Ligue du Bien Public. Louis XI l'emporta dans cette curieuse bataille de Montihéry où, comme nous le raconte Commyne «les deux camps se proclamérent vainqueurs». Charles Le Téméraire fut blessé, la cicatrice qu'il en garda servit à son identification après Nancy.

(7) L'affaire ne s'arréta pas là, tant l'époque était attachée à la continuité de l'héritage et avait de l'aversion pour tout ce qui pouvait constituer un obstacle à la transmission normale des biens. Louis de Fosseux dès la mort de son père, Jean II (1477) s'efforça de récupérer son héritage augmenté de celui de son frère Nivelle mort la même année que son pére.
Le parlement de Paris en 1483, confirma l'arrét royal d'exhérédation. Guillaume finit par constituer à son frère une rente perpétuelle. À la génération suivante, Anne de Montmorency eut encore à s'occuper de cet héritage qui se termina par une transaction avec les héritiers de son oncle.

(8) Ces états généraux de 1484 marquent une date dans l'histoire de France. Tous les opposants à la monarchie absolue y ont relevé la tête pensant que la Régence équivalait à une période d'affaiblissement du pouvoir royal. Les Parlements, parce qu'ils voulaient imposer une charte sur le modèle anglais (comme, par exemple, Commyne l'historiographe de Louis XI), les grands seigneurs, parce qu'ils pensèrent évidemment que le temps était venu de retrouver leur puissance et indépendance d'avant Louis XI. Écrasés à la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier, le 27 juillet 1488, ils durent mettre fin à la «Guerre folle» et reconnaître l'autorité des Beaujeu. Guillaume de Montmorency, leur fidèle conseiller, se retrouve encore une fois dans le camp des vainqueurs !

(9) À Chantilly, Guillaume apporta les premières transformations. Il fit démolir l'ancienne chapelle en ruine du château et en fit reconstruire une nouvelle consacrée à Saint-Jacques et à Saint-Christophe. Des vitraux le représentant avec sa femme et ses enfants y furent placés. Le baron vit la disparition du vieux château de Pierre d'Orgemont, rasé à partir de 1528 par son fils Anne qui n'en conserva que les fondations pour confier à Pierre Chambige la construction d'un édifice plus conforme au style du temps. Le nouveau château n'était pas terminé lorsque Guillaumey rendit l'âme en 1531.
En plus du célèbre château, Guillaume trouva également dans cet héritage l'hôtel d'Orgemont (ou de Méru) sis au faubourg Saint-Antoine et qui demeura la propriété des Montmorency jusqu'en 1585.

(10) Guy Pot était le frère de Philippe Pot (1428-1494), seigneur de La Roche, grand sénéchal de Bourgogne, qui rejoignit Louis XI après la défaite du Téméraire. Député de la noblesse de Bourgogne aux États-Généraux de 1484, il prononça un discours mémorable contre les empiètements de la royauté dans lequel on retrouve des accents de constituant de 1789 «L'État est la chose du peuple ; la souveraineté n appartient pas aux princes, qui n'existent que par le peuple... j'appelle peuple l'universalité des habitants du royaume».
Philippe Pot s'était fait construire à l'Abbaye de Citeau un tombeau magnifique, qui est aujourd'hui au Louvre.

(11) Le pas d'armes : Le Pas d'armes est la pratique chevaleresque qui remplaça le tournois. De simple entrainement à la guerre, au départ, cette forme de combat, s'enrichit au cours des siècles de multiples règles de plus en plus complexes. Vers le 12e siècle, le tournois abandonne le champ ouvert pour se dérouler en champ clos (la lice) où les vainqueurs se voient remettre des prix sous le regard émerveillé des dames. À la fin du moyen-äge, continuant son glissement vers la pratique sportive et rituelle, le tournois devient «le Pas d'Armes» où seule la grande noblesse s'affronte, non seulement par les armes, mais aussi par la richesse de ses coutumes et de ses armures. Pour les joutes à cheval, le choc frontal est remplacé par un choc latéral, entre les deux cavaliers que sépare une barrière basse «la toile». À pied les armes sont courtoises (c'est-à-dire émoussées). Cette période se termine brusquement, en France, en 1559, le jour où la lance de Montgomery pénétra le heaume de Henry II. À l'heure actuelle, tournois et Pas d'Armes ne sont plus présents que dans le vocabulaire. Les «joutes oratoires» après «l'entrée en lice» des hommes politiques sont tout de même moins dangereuses.

(12) Le genét est une espéce de cheval d'Espagne, de petite taille, mais bien proportionné (cf Littré).

(13) N’oublions pas qu’a la méme époque son fils Anne est «nourri», pour son apprentissage de jeune seigneur, dans la plus illustre famille qui soit, les Angoulème dont le fils, François, est l‘héritier présomptif de la couronne de France..

(14) En 1510, Anne a 17 ans. Il devient, seigneur de la Rochepot titre qu'il gardera jusqu’en 1516 où , a la mort de son frére ainé, il reprendra le nom de la famille. Le nom du fief d'origine de sa mere deviendra alors celui du quatriéme enfant de Guillaume, François.
En attendant son pére l'envoie guerroyer sous les ordres de Louis de la Trémouille en lui attribuant, généreusement, 500 livres «de bonnes armes et un cheval».

> (15) Baillargeat. Les tombeaux de Saint Martin de Montmorency. Paris 1972

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Portrait de Guillaume de Montmorency

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