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Une auberge célèbre à Montmorency

Le nom de la famille Leduc est indiscutablement lié à la célèbre auberge, qui vers 1789 sans doute, a pris le nom d’auberge du Cheval Blanc.

Une dynastie, devrait-on dire, car, en effet, à partir de sa création en 1739, quatre générations de Leduc vont se succèder à la direction et au four, de cette auberge promise à un bel avenir.

Cette famille est présente depuis de nombreuses années sans doute, à Montmorency lorsque «Le 27 avril 1694 a esté baptisé un garçon nommé Nicolas, né le 24 du mois, du mariage de Jean Le Duc voyer du Duché d'Anguien, et de Anne Petit sa femme ; le parrain fut Nicolas Couet Procureur et la marraine Marie Madeleine Le Hesle». C'est le futur créateur de l'auberge. À 45 ans, sans rompre avec la tradition familiale de voyer arpenteur du Duché, il décida d’ouvrir une auberge avec sa femme Marie Hardebeuf, qui étant fille de Pierre Hardebeuf hôtelier avait sans doute une bonne formation de base et ses nombreux enfants purent l'aider.

Cette entreprise débuta par un acte notarié daté du 5 janvier 1739 passé devant Maître Eustache Paquerost notaire au Duché d’Anguien : «Furent présents Françoise Lefeuvre et Marie Anne Lefeuvre, filles majeures demeurant à Anguien, lesquelles déclarent solidairement l'une pour l'autre, sans discussion ny division sur ce à quoy elles renoncent, déclarent avoir vendu, cédé, transporté et délaissé avec promesse de garantie de maintenant et à toujours au Sieur Nicolas Le Duc voyer et arpenteur juré du Duché Pairye d'Anguien, à ce présent et acceptant pour luy et hoirs (héritiers), et ayant acquitté les coster (coût) à savoir le droit d'égout et le droit de bâtir et de construire par le dit Sr le Duc, sur le mur commun de clôture du jardin appartenant aux Dames Lefeuvre, séparant leur jardin et leur maison d'habitation, le dit acquéreur souhaiterez que à ce dit Anguien, face à la place du Marché on pend pour enseigne : La Fleur de Lis.
Lequel droit d'égout et appenty et autre construction que l'acquéreur accepte de faire sur le dit mur, sera pris d'un bout sur la maison appartenänt aux hoirs Floho et l’autre bout pour l'alignement à la costière
(gauche) d'une grange appartenant aux Dames Lefeuvre, mesuré en présence des intéressés 25 pieds de longueur (soit 8m120)».

Abrégeons un peu ; tous ces droits plus les frais de notaire plus les cens et rentes dues à Mr le Duc d’Anguien Seigneur du lieu, constituent une opération préliminaire qui fut réglée avec une pièce de 6 livres ayant cours, en présence des Sieurs Claude Clouet l'aîné et Pierre Duquesne Procureurs au bailliage.

Ces premières bases jetées, le Sr Nicolas Le Duc acquit ensuite une maison sur cet emplacement même, et le 3 avril 1740, il versa la somme de 1200 livres en présence du Sieur René Lefevre père et tuteur des dames Françoise Lefevre et Marie Anne Lefevre femme de Jean Gaudrau maître perruquier.

L'Auberge de «La Fleur de Lis», tel était son nom, probablement jusqu’au début de la Révolution car les enseignes coûtaient 1000 écus au XVIIIe siècle pour les plus belles en fer forgé et pendues à une potence, c’est pourquoi elles se transmettaient généralement de père en fils. L’abus à Paris de tous les emblèmes et aimables inventions populaires, avait conduit les autorités à édicter des ordonnances de police en 1600 et en 1660, soumettant le droit de pendre une enseigne à une autorisation écrite du grand voyer. De même en 1761 les dimensions des auvents et des enseignes firent l’objet d’une réglementation sévère, elles ne devaient pas dépasser une saillie de 1m pour les grandes rues et 80cm pour les petites. Elles furent même, quelques mois après sur l’ordre de Mr de Sartines rabattues contre les murs.

Mais c’est la Révolution qui en supprimant les enseignes et emblèmes contraires aux lois, aux mœurs et même à la langue française, donna une nouvelle impulsion à cet art populaire libre à nouveau de s’exprimer comme il l’entend.

D’après la liste générale des Postes de France, rédigée par ordre de Jean Colbert, éditée chez Jaillot (Paris) géographe de sa Majesté, en vertu d’un privilège du Roi, accordé à Fontainebleau en 1708, on peut voir que la Poste la plus proche de Montmorency est celle de Paris à Beauvais, qui passait largement au nord à St Brice, donc l’aubergiste Nicolas Leduc n'était pas Maître de Poste, mais logeait sans doute à pied et à cheval, en ce temps où les routes n'étaient pas sûres en campagne et où les auberges fermaient à 6 heures en hiver et à 9 heures en été.

L'auberge débuta dans une ambiance favorable. Le XVIIe siècle marque le tournant de la cuisine française et à Montmorency on suivait la mode de Paris et de Versailles. Dans ces villes, les taverniers, cabaretiers et hôteliers d’antan, plus ou moins appréciés, avaient évolué et s'étaient transformés en aubergistes restaurateurs, traiteurs et cafetiers qui servaient des mets cuisinés avec art, et, à l’habitude des repas fastueux et quantitatifs où toutes les essences, épices et ingrédients divers se retrouvaient dans un même plat après avoir été cuits dans le même pot, succédèrent des repas de gourmets.

Le Régent Philippe d'Orléans eut au moins le mérite d’avoir contribué dans une large mesure à la rénovation et à la renommée de la cuisine française.

Il conviait disent les chroniqueurs du temps, ses amis à des dîners, qu'il préparait lui-même dans une antichambre transformée en cuisine. Et dans de la vaisselle d’argent il mettait la dernière main à des mets délicieux.

Les gens de la noblesse se mirent à l’imiter, et assistés dans l'ombre par leur chef de cuisine, parrainaient volontiers des plats conçus ainsi en collaboration : sauce béchamelle (de Beschemell secrétaire du Roi au XVIIe siècle), crème Chantilly, cailles à la Duxelle et Poularde à la Montmorency.

Bien située sur la Place du Marché, l’auberge de la Fleur de Lis faisait le plein ; que d’accords, que de ventes furent conclus dans ce lieu les jours de foire. On y voyait aussi les procureurs et huissiers du bailliage les Srs Clouet, Lesguilliers dont beaucoup étaient alliés aux enfants de Nicolas Leduc, lequel décéda le 5 février 1741 âgé de 47 ans.

Mais la relève était prête, son fils aîné Jean François Leduc II, marié à Madeleine Lesguilliers, né en 1721, lui succéda, celui qui fut le légendaire «Père Leduc» décrit par Lefeuvre en 1864 : «Il portait invariablement un bonnet de coton, une culotte de peau et l'épée de cuisine au côté». Grand voyer du Duché, marguillier en charge, il prit la direction de l'auberge qui comprenait déjà un grand four et un étal de pâtissier.

Ce terme désignait alors une grande variété d’aliments : viande, volaille, poisson, oiseaux, truffes etc... enveloppés dans de la pâte feuilletée.

Jean François Leduc II, celui qui dans son auberge s’honora de la visite de Jean Jacques Rousseau et du Maréchal de Luxembourg et fut témoin de tant de discussions et polémiques dans les années précèdant la Révolution ne vit pas celle-ci s’accomplir. Il décéda le 22 septembre 1788 âgé de 67 ans.

L'inventaire de ses meubles, linge, bijoux et argenterie ainsi que des deniers en or et en argent fait à la requête des huit enfants héritiers, en présence de Maître Jean Baptiste Sédillot notaire, fut prisé à la somme totale de 2342 livres. Tous les témoignages de sa bonne réussite commerciale et de sa position parmi les notables de la ville s’y trouvent réunis.

Depuis les célèbres bonnets blancs à mèche et les tabliers de cuisine jusqu'aux souliers à boucles d’argent. Pas moins de cinq habits et leurs vestes, gris en drap d’Elbeuf, noir et velours cramoisi, le tout assorti de jabots en mousseline, de trois chapeaux et cinq paires de gants, dont deux en peau blanche. Parmi l’argenterie en argent blanc poinçon de Paris se remarque une grosse cuillère à ragoût.

Son fils Nicolas Leduc III, né le 22 octobre 1754, voyer marié à Marie Jeanne Lesquilliers, lui succèda et connut une période transitoire difficile pendant les premières années de la Révolution, mais n’anticipons pas sur les événements.

Simone Hervo

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Bibliographie

Un mariage peu ordinaire

Le 25 février 1783 après la publication des bans faite dans cette paroisse et dans la paroisse roiale de St Germain l'Auxerrois, à Paris, par 3 jours de Dimanche consécutifs, savoir les 9e, 16e et 23e jours de février présent mois, sans opposition quelconque; comme il nous a apparu par le certificat de Mr le Vicaire de la susdite paroisse de St Germain l’Auxerrois, en date du 24e jour du dit mois signé Grancher et après les fiançailles célébrées la veille, ont été mariés par nous et, après que nous avons eu pris leur consentement mutuel et libre, ont reçu de nous la bénédiction nuptiale Jean Louis Finel marchand mercier fils majeur de défunt Emmanuel Finel et de défunte Anne Hudelot ses père et mère demeurant à Paris, Place du vieux Louvre, paroisse de St Germain l’Auxerrois, âgé de 62 ans d'une part et Michelle Nicole Derene, fille majeure de Jean Derene marchand fruitier à Gonesse et de défunte Denyse Letinoir ses père et mère, cy-devant domiciliée sur la susdite paroisse de St Germain l'Auxerrois et à présent en cette paroisse, âgée de 26 ans d'autre part, assistés de Jean Baptiste Dubois, Jean Duquesne, Claude Prévost tous 3 soussignés et Denys Luce lequel a déclaré ne savoir signer, les 4 habitants de cette paroisse. En présence desquels, les époux nous ont déclaré que de la cohabitation qu'il y a eu entre eux, il est né à Paris un enfant mâle qui a été baptisé sur la paroisse St Eustache le 22 mars 1778 et. nommé André Benoist ; ils le reconnaissent pour leur enfant, consentent qu'il jouisse de tous les droits de la légimité, qu'en conséquence il leur succède en tous leurs biens de même que s'il était né postérieurement à leur mariage, et ont signé avec nous.

Brodier, curé

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